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Récidive

Pour faire référence à la page 88 du manifeste

Texte rédigé par Jean-Pierre (JPA)

 Annexe rédigé par Homayra Sellier (SG)



La sociologie se préoccupe des risques de récidive des actes délinquants après l'exécution d'une peine. 

Pour la France (entre autres) un constat s'impose : la prison, telle qu'elle y est pratiquée ne prévient que trop peu de la récidive. Toutefois il faut éviter toute interprétation globalisante tant il y a de types différents de délinquance et de profils différents de délinquants. Jusqu'à présent, il ne semble pas que ces « subtilités » aient été suffisamment prises en compte.  


Quelles sont donc les fonctions attribuées communément à la prison ? 

A l'exception, notable, de nombreux spécialistes et chercheurs, pour ce qu'on appelle « le sens commun », c’est-à-dire l'opinion spontanée de la population, des politiques, des journalistes, la prison a pour fonctions : 

  1. De punir, 
  2. De protéger la société pendant le temps de la détention, 
  3. De servir d'exemple dissuasif pour d'autres délinquants potentiels, 
  4. D'ôter, mais seulement par la crainte du châtiment, l'envie de récidiver.  Ces quatre raisons se heurtent souvent entre elles et pas toujours dans la clarté. 

En théorie la loi régente d'abord la première raison : sanctionner (ou « punir » selon les registres lexicaux… ou autres) de façon proportionnée les délits et les crimes. La liste des crimes (« incriminations ») a été dressée (et souvent modifiée par adjonction, suppression, redéfinition) et accompagnée des peines associées. Une marge de variabilité est permise à la justice : les circonstances atténuantes ou aggravantes. Toutefois, dans les faits on constate une forte influence de « l'ambiance du moment » pour ne pas s'en tenir au registre de base. Les magistrats résistent ou non aux pressions extérieures en invoquant l'indépendance de la Justice qui résulte de la théorique « séparation des pouvoirs »


A ces raisons clairement formulées s'en ajoute une qui est inavouée : la démagogie politicienne, notamment à l'approche d'élections, qui vient brouiller les cartes en développant les peurs, y compris dans des situations sociales habituelles, mais surdramatisées. On voit de plus en plus souvent l'exécutif, avec la contribution de certains médias, tenter, en manipulant l'opinion publique, de biaiser la séparation des pouvoirs. On mise alors sur l'émotion populaire qui n'est pas la meilleure conseillère. 


Sur ces bases beaucoup estiment qu'il est normal et même souhaitable que les conditions de détentions soient très dures. On oublie ainsi que la fonction de la prison se limite à la privation de liberté proportionnée au délit commis.

Dans ces conditions, qu'en est-il de la récidive ? 

Nous nous limiterons ici aux crimes sexuels.  

En ce domaine a situation est particulièrement complexe selon que l'origine du crime se situe ou non dans la structure profonde d'une personnalité construite depuis l'enfance. Le cas des tueurs et/ou violeurs en série illustre cette situation. 


Il est nécessaire (En schématisant) de distinguer les psychotiques structurels dont l'ensemble de la personnalité s'est agencée de façon aberrante, ici autour d'un irrépressible besoin criminel et ceux qu'on peut appeler les opportunistes cyniques (Les « profiteurs », pourrait-on dire) qui, par ailleurs peuvent mener une vie (presque) normale. Pour ces opportunistes consommateurs de sexualité éventuellement criminelle on constate deux circonstances favorisantes : pour certains la proximité, voire la familiarité des victimes potentielles, pour d'autres l'argent qui, en abondance permet de satisfaire tous les fantasmes. 

Pour les premiers, les psychopathes, irrémédiablement récidivistes s'ils sont en liberté, on n'envisage actuellement, après la prison, que des mesures coercitives. On peut penser qu'aucun raisonnement logique ne peut opérer un retournement comportemental par le réagencement d'une structure profonde Le constat est aggravé lorsque la pulsion sexuelle s'accompagne de l'absence totale d'empathie (la victime n'est qu'un objet). Dans ces conditions, pour ces cas jugés irrémédiables est souvent envisagée la castration chimique (drogues spécifiques) qui nécessite un contrôle suivi sans limite de temps. Le système judiciaire en a-t-il les moyens ? On sait qu'actuellement la réponse est non. Ce peut être l'internement dans un établissement psychiatrique avec un solide encadrement spécialisé. L'enfermement peut y être permanent ou tolérant certains aménagements temporaires de semi-liberté permis avec des dispositifs comme le bracelet électronique et/ou la castration chimique.  


Pour les seconds, les mesures actuelles comportent l'association entre un fichier national incluant les empreintes génétiques. S'y ajoutent de possibles interdictions territoriales. On est allé plus loin en Grande Bretagne où chaque entité territoriale possède une liste des délinquants sexuels locaux déjà condamnés. Difficulté : il suffit de réussir à changer de pays pour reprendre ailleurs ses activités criminelles. Ce fut le cas de Francisco Arce Montes meurtrier de Caroline Dickinson en France où il était inconnu, mais fiché aux USA. 

Comme on le constate, en aval, les mesures prises reposent théoriquement sur la surveillance permise par la technologie, l'internement et l'obligation de soins.  


Nous devons aussi réfléchir à ce constat : la quasi-totalité des criminels sexuels ont été eux-mêmes victimes de violences et/ou d'abus sexuels dans leur enfance. 

Conclusion : en faisant reculer la pédocriminalité aujourd'hui nous travaillons aussi à la faire reculer demain.


Par ailleurs, à côté des personnalités structurellement psychopathes on constate des abus sexuels sur enfants commis au sein de la famille, par des proches, par des encadrants éducatifs ou sportifs ou de loisirs. La famille est le lieu le plus fréquent. Les abuseurs ne sont pas forcément incontrôlables, ils profitent d'occasions et se caractérisent par l'absence de scrupules. Certains sont sans doute rééducables ou, au moins, contrôlables. C'est une tâche complexe qui incombe aux spécialistes, à condition qu'ils existent en nombre suffisant. Notons aussi, les actualités des dernières décennies l'ont montré, que l'argent permet aux « profiteurs »  qui le détiennent et qui connaissent les réseaux proxénètes ou qui sont connus d'eux. de laisser libre cours à toutes les formes de consommation sexuelle.  

Les récentes actions initiées par des femmes victimes (#Me-too, #Balance ton porc) ont clairement montré que la dénonciation des prédateurs opportunistes est efficace. Cette initiative n'est pas venue des autorités politiques mais des femmes elles-mêmes. C'est une leçon à méditer… et la première méditation est celle-ci : des femmes (les militantes) ont compris qu'elles avaient, comme adultes et citoyennes le pouvoir de parler, de démasquer, de dénoncer, et ainsi de faire bouger la société (Institutions et opinions publiques). MAIS les enfants victimes n'ont pas ce pouvoir de prendre leurs affaires en mains. Ils ne peuvent que compter sur la mobilisation désintéressée des adultes les plus responsables. C'est bien l'objet de cet ouvrage.


On peut, on doit s'interroger sur les mécanismes qui permettent dans notre société marchande de tels trafics, le plus souvent en toute impunité. Dans ces conditions, c'est l'omerta qui permet la récidive. Comme pour d'autres combats, les avancées ne viendront pas des pouvoirs en place mais des luttes des victimes et des lanceurs d'alertes. 

Mais en amont, on ne peut faire l'économie de la compréhension de la genèse de personnalités sexuellement dangereuses. Ce pourrait (devrait ?) être l'objet d'une thèse. Retenons que nombre de violeurs en série ont eux-mêmes été victimes de viols dans leur enfance. Notons aussi que certains milieux familiaux ou relationnels perpétuent le machisme, infériorisent la femme, réduisent la sexualité à la satisfaction primaire du besoin masculin. A cette persistance culturelle s'ajoute aujourd'hui la facilité d'accès, via Internet à des sites pornographiques immondes. 


Nous ne conclurons pas ici sur les approches en cours sinon pour dire qu'une réflexion globale suivie d'actions s'impose. Le viol, y compris d'enfants est présent depuis des millénaires dans les profondeurs sombres de la culture collective. Il serait faux de penser qu'il n'est le fruit que d'une minorité de pervers. Toutes les guerres ont montré qu'une bonne partie des soldats ou mercenaires laissent libre cours à leurs pulsions aux dépens des populations civiles si on leur laisse carte blanche. Par ailleurs ils pourraient, en paix et en famille, être considérés comme des gens normaux. C'est sans doute là le problème le plus complexe à affronter car il n'est pas individuel. 

Pour conclure, qu'en est-il du taux de récidive ? 

Selon les chiffres publiés en 2017 par le ministère de la justice français, le taux de récidive serait de 5,6% pour les « crimes sexuels » et de 19% pour les « délits sexuels ». C'est moins que pour les autres délits, on pourrait donc se monter raisonnablement satisfait. Ce serait oublier deux éléments qui faussent les statistiques. Premièrement un nombre non négligeable de crimes (viols) sont requalifiés en délits (Ce qui désencombre les cours d'assises), deuxièmement seuls 10% des crimes et délits sexuels font encore en 2020, l'objet d'une plainte… suivie ou non d'effets (La situation a probablement un peu changé depuis peu, non par l'action première des autorités mais par les campagnes des mouvements féministes).  

  1. Il faudrait que l'ONU (Pas seulement sa commission ad-hoc) se prononce solennellement sur un principe clair, simple et surplombant toute autre approche du genre « Aucun être humain ne peut disposer à son seul gré d'un autre être humain, quel qu'il soit ». 
  2. J'ai professionnellement travaillé sur « la convention des droits de l’enfants ». A l'époque aucun pays à majorité musulmane ne l'a signée sans « réserves » - les réserves étant permises - Ces réserves portent sur l'obligation religieuse ex : « tous les Maldiviens sont musulmans » et par conséquent sur la liberté de pensée, ainsi que sur le droit de châtiment du père. Les USA n'ont jamais entériné leur signature (Motif réel : aucune leçon ni contrainte ne peut venir de l'extérieur des USA. De ce fait ce pays ne signe presque jamais les conventions internationales… sauf les extraditions en sa direction. Exemple en cours : Julian Assange.
  3. Relisant Epicure (Lettre à Ménécée, vers - 300) je vois écrit : « Ce n'est ni l'incessante succession des beuveries et des parties de plaisir, ni les jouissances que l'on trouve auprès des jeunes garçons et des femmes, ni (...) les autres mets qu'offre une table abondante (...) qui rendent la vie agréable. ». Ce n'est pas la « pédophilie » que condamne le (grand) philosophe grec mais son abus, comme pour l'excès dans la nourriture. Ce qui nous renvoie, au-delà d'Epicure, au « bon sens » commun dans la Grèce antique. 

(JPA) 

Annexe (SG)

Qu’est-ce qu’un récidiviste ? 

Un père qui viole son enfant des années durant, sera, s’il est arrêté, considéré comme un primodéliquant ! 


En France, on répète qu’on a « tout essayé et que rien ne marche ». En réalité, on n’a rien essayé et on préfère ignorer les expériences souvent intéressantes, menées dans d’autres pays. Au Canada, notamment : « Notre clinique existe depuis environ 16 ans et aucun des hommes qui a suivi ce programme n’a récidivé en commettant une agression, » précise le docteur Paul Fedoroff, psychiatre au Centre de santé mentale Royal Ottawa (voir sur le site de Radio Canada : Peut-on guérir de la pédophilie ?)


Au Canada, une personne qui souffre de son attirance pour les enfants dispose d’un choix de structures qui peuvent l’aider à rester abstinent : 

Institut Philippe-Pinel de Montréal. 

  • Centre de santé mentale Royal Ottawa. 
  • Clinique des comportements sexuels, Centre de toxicomanie et de santé mentale de Toronto. 
  • Regroupement des intervenants en matière d’agression sexuelle. Il n’existe aucune structure équivalente en France.
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