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Hollywood

Pour faire référence à la page 69 du manifeste


Contrairement à ce que pouvait suggérer la médiatisation de l’affaire Weinstein, parmi les principales victimes des violences sexuelles à Hollywood, il y avait des enfants. 

Posons le décor. 


Dans les années 1930, c’est à Hollywood que fut érotisée la première enfant-star, Shirley Temple. Elle jouait, chantait, dansait, éblouissait comme une grande. Ses boucles blondes furent comptées (54 !) et mondialement connues. Plusieurs années de suite, elle fut première au box-office, devant les plus grandes vedettes… Gary Cooper et Clark Gable, notamment. La promotion par le septième Art du modèle américain, l’« american way of life », a très vite incorporé de jeunes enfants. Shirley Temple, Judith Garland… 


Loin de Washington et motivée par les billets verts, l’industrie du cinéma aguiche les spectateurs en flirtant avec les interdits. La crise économique de 1929 va exacerber la tendance. La violence attire les foules ? Scarface remplit les salles. Mais, pour éviter les foudres des Ligues de Vertus qui la dénoncent comme la « nouvelle Babylone », Hollywood s’engage à bannir « l’immoralité » des scénarios, et accepte en 1930 un protocole d’auto-censure, le Code Hays . 

La sexualité est suggérée et l’hypocrisie institutionalisée. Sexe, drogues… Les scandales se succèdent à Hollywood. Qu’importent les mœurs des fabricants de rêve, seul compte ce qui apparaît sur les écrans. La fiction efface le réel et Hollywood a toujours défendu les siens. Prenons l’exemple du réalisateur Roman Polanski. En 1967, il drogue et viole Samantha, une gamine de 13 ans. Il reconnaît les faits, mais fuit les États-Unis pour éviter la prison. Il partage son exil entre la France qui l’accueille sans réticence, et la Suisse où la justice des USA finit par le rattraper en 2009. Il risque alors l’extradition. Hollywood se mobilise pour lui. Parmi ses soutiens les plus actifs, Harvey Weinstein lance une pétition et déclare : « Quoi que pensiez du crime supposé, Polanski a payé sa dette », dans une tribune publiée par The Independant. Belle synthèse de la pensée hollywoodienne. Le viol avéré d’une enfant devient « un crime supposé ». Et la Justice n’a pas à s’en mêler car le microcosme de l’industrie du film, juge et partie, a décidé que l’ardoise Polanski était effacée. Le ministre français de la Culture, Frédéric Mitterrand, s’aligne sur cette position. Il déclare : « De voir (Roman Polanski) ainsi jeté en pâture pour une histoire ancienne qui n’a pas vraiment de sens et de le voir ainsi seul, emprisonné, alors qu’il se rendait à une manifestation où on allait lui rendre hommage, c’est-à-dire ainsi pris au piège, c’est absolument épouvantable. » 

Aucun doute pour le ministre de la Culture, la victime, c’est Roman Polanski ! Pas un mot de compassion pour Samantha. Le fait de droguer et de sodomiser une enfant, crime non prescrit aux USA, devient « une affaire ancienne qui n’a pas vraiment de sens » ! Et Frédéric Mitterrand d’ajouter que le président Sarkozy suit le dossier et estime qu’il est « au même diapason d’émotion que (lui) et que tous les Français ». On nous permettra d’en douter ! Voilà donc un ministre en exercice qui s’immisce dans le dossier judiciaire d’un autre pays et qui affirme qu’un artiste (et Polanski en est un grand !), doit échapper à la législation commune. La loi, les tribunaux et la prison ne devraient concerner que le petit peuple. Superbe plaidoyer pour l’impunité d’élites autoproclamées. La même année, Harvey Weinstein déclare au L A Times qu’Hollywood est « le meilleur compas moral ! » Pour quelle raison ? « Parce qu’il a de la compassion […] Nous avons organisé la collecte télévisée pour les victimes du 11 septembre. Nous étions là pour les victimes de Katrina et nous sommes présents à chaque catastrophe mondiale. » Les criminels sexuels aiment à faire dans l’humanitaire. Quant aux enfants victimes de viols… 

Des crimes supposés ? Elijah Wood, l’acteur vedette de la saga Le Seigneur des Anneaux accuse, en mai 2016, Hollywood d’être un nid de pédophiles très puissants et jamais inquiétés. Pour lui, les jeunes acteurs étaient des proies dans la capitale mondiale du cinéma dit commercial. Elijah Wood n’est ni le seul, ni le premier des ex-enfants starisés à briser le silence. 

En 2011, l’un des interprètes du film Les Goonies, Corey Feldman, a qualifié « l’industrie du show-biz (comme étant) probablement le milieu au monde, où les adultes ont le plus de liens directs et inappropriés (sic) avec les enfants ». Son ami Corey Haim, autre ex-star junior, venait de mourir, et Corey Feldman, a expliqué qu’il s’était suicidé à la suite des viols subis dans son enfance à Hollywood. Une hypothèse controversée. Bella Thorne , autre ancienne enfant-star, issue des studios Disney, révèle dans un livre autobiographique, avoir été « agressée sexuellement et maltraitée physiquement, de six à quatorze ans ». En ajoutant, sans ménager son entourage familial : « Tout le monde l’a vu et personne n’a rien fait. » Quant à la carrière de Kevin Spacey, le personnage central de la série House of Cards, elle a subi un coup d’arrêt en octobre 2017, lorsqu’il fut accusé de harcèlement par un garçon de quatorze ans… Comment passer sous silence les déclarations de Brad Pitt, en juin 2017. 

Quatre mois avant la chute d’Harvey Weinstein, il déclare : « Vous pensez que Hollywood fait des films ? C’est juste un sous-produit : il s’agit de faire de l’argent, et plus important encore, il s’agit de pouvoir et de contrôle […] Les gens qui dirigent Hollywood, gèrent aussi l’Amérique et la plupart du monde, et ils ne se soucient pas des films […] Les enfants veulent faire du cinéma, ou plutôt, leurs parents veulent qu’ils en fassent et qu’ils deviennent célèbres […] C’est le rêve américain […] et les parents feront n’importe quoi pour y accéder […] Un millier d’enfants se présentent pour le rôle principal d’un film. Une centaine pourraient probablement l’obtenir… Qui obtiendra le rôle ? »

Brad Pitt accuse certes des parents de « vendre » leurs enfants, mais il dénonce surtout un système de corruption qui unit le cinéma à la télévision et à l’ensemble du show-biz. L’enfant devient alors « une monnaie d’échange » passant de main en main pour assurer la promotion du film. Chaque intermédiaire se faisant, au passage, beaucoup d’argent. Et Brad Pitt de poursuivre : « L’enfant est envoyé à un gars qui dirige un réseau de télévisions » pour faire la promotion du film. « Le gars de la télévision ne dira rien de mal à propos du film parce que chacun sait ce que l’autre a fait avec ce jeune enfant. » Et, selon Brad Pitt, cela dépasse Hollywood pour inclure « les politiciens, les banquiers et les autres… » Pressé d’en dire plus, la star internationale met en cause « des sociétés secrètes, des politiciens, des banquiers et des médias. Ce sont eux qui dirigent ces réseaux pédophiles. Ils gouvernent le monde, et tout le fric revient à Hollywood »

Sommé de donner des noms, Brad Pitt refuse : « Je suis une cible trop facile pour faire des procès. » Il prédit que grâce à l’Internet, dans un avenir proche, « de grosses têtes vont tomber… » Pourquoi les réseaux sociaux ? Parce que, selon lui, « Les médias ne vont jamais exposer la vérité car ils font partie du système ». En évoquant les Illuminati et des « élites » occultes, Brad Pitt est immédiatement discrédité. Étiqueté « complotiste » la presse rejette en bloc ce qu’il avance sans rien prouver. Elle jette le bébé avec l’eau du bain. Nous n’avions pas accordé le moindre crédit aux propos du célèbre acteur. 


Quatre mois après les déclarations de Brad Pitt, Harvey Weinstein tombait, à la suite d’enquêtes menées (et sur ce point, Brad Pitt se trompait) par quelques titres de la presse écrite (Le New York Times et le New Yorker notamment).

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